lundi 23 juin 2008

L’Abkhazie à Paris, Gazprom en Abkhazie

Le président de l’Abkhazie était à Paris vendredi 20 juin. Deux jours après, Gazprom, le géant russe, lance des projets de prospections pétrolières et gazières off-shore au large de la province séparatiste officiellement dépendante de la Géorgie. Nouveau regain de tensions à venir entre Tbilissi et Moscou.

Sergueï Bagapch, « président de l’Abkhazie » était de passage à Paris, la semaine dernière, à l’invitation du magazine Foreign Policy, version française. Pour la première fois depuis la sécession de cette province située en Géorgie sur les bords de la mer Noire, le « président » abkhaze a obtenu un visa d’entrée en France.

Accompagné du député russe Constantin Zatouline, le « président » abkhaze est venu défendre sa cause devant un public français comprenant Alexandre Adler, Philippe Moreau Defarges, François Nicoullaud, des chercheurs, des hommes d’affaires et des journalistes.

Rien d’autre que l’indépendance. Pas plus, pas moins. Ce sont les termes de Sergueï Bagapch lorsqu’il répond aux questions sur le déblocage du conflit qui l’oppose à la Géorgie. L’Abkhazie revendique son indépendance depuis la chute de l’URSS alors que Tbilissi cherche à conserver cette province maritime dans son espace national. Une guerre les a opposés de 1992 à 1994, remportée par les Abkhazes soutenus par l’armée russe. Une mission de l’ONU se trouve sur place et la paix est assurée par un cessez-le-feu garanti par une force de maintien de la paix majoritairement composée de forces russes.

Depuis 2006, les relations entre la Géorgie et la Russie se sont dégradées et l’Akbhazie sert souvent de théâtre de rivalités russo-géorgiennes : affaires d’espionnages, attaques, embuscades, opération-éclair, affrontements, destruction d’un drone, arrestations de soldats russes… En deux ans, la région vit au rythme de turbulences, en deçà d’une guerre traditionnelle mais au-delà d’une guerre des mots… La Géorgie, candidate à l’OTAN, devrait, si les conditions sont remplies, signer un Membership Plan Action (MPA) avec l’Alliance en décembre. Or, la Russie ne veut pas en entendre parler. La Russie qui cherche à rejoindre l’OMC voit sa candidature bloquée par la Géorgie. Tbilissi appelle Moscou à cesser tout soutien au « séparatisme abkhaze ».

Alors que Sergueï Bagapch se trouve à Paris pour louer le rôle « stabilisateur » de la Russie dans la région et sensibiliser les autorités françaises sur la question abkhaze à quelques semaines de la présidence française de l’Union européenne, au même moment Gazprom annonce qu’il va prospecter dans la province rebelle. Le géant russe a lancé plusieurs travaux off-shore à la recherche de pétrole et de gaz au large des cotes géorgiennes. Ce qui ne vas pas manquer d’irriter Tbilissi, qui va dénoncer la violation de ses eaux territoriales. D’où aussi une autre bonne raison pour la Géorgie de bloquer l’adhésion de la Russie à l’OMC.

Soukhoumi, chef lieu de l’Abkhazie a également annoncé l’ouverture d’une ligne aérienne avec Moscou. Cette démarche s’inscrit dans la continuité de la politique mise en place par les Russes depuis des mois, notamment après la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo par les Occidentaux. Moscou avait annoncé en représailles qu’il ouvrait des bureaux de représentations russes en Abkhazie et en Ossétie du Sud, l’autre entité hostile à la domination géorgienne et proche des Russes.

Quoi qu’il en soit, la Géorgie a plus à perdre dans ce duel que la Russie. Si l’escalade se poursuit, il y a de fortes chances que Tbilissi et Kiev ne signent pas un MPA avec l’OTAN, les Occidentaux, à commencer par les Français et les Allemands préférant privilégier leurs relations avec Moscou et appelant Tbilissi à manifester sa bonne volonté afin d’apaiser les relations avec le grand voisin du nord.

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